Lors de la séance plénière du 1er février 2022 du CESER NA, à l’occasion de la présentation du budget primitif du conseil régional, le groupe des associations a pris la parole pour alerter sur les pertes d’emplois liées à la fin du dispositif sur les emplois associatifs en Limousin. Il a aussi été rappelé l’importance des bénévoles et du travail accompli par les associations dans tous les territoires et sur une grande diversité de champs : social, culturel, sportif, environnemental, naturaliste, … Il a enfin été fait part de l’inquiétude concernant l’entrée en vigueur au 1er janvier 2022 du contrat d’engagement républicain concernant les associations et les fondations, et de la façon dont son application sera appréciée par les autorités administratives.
Voici l’intervention complète de Jany ROUGER :
« Madame la Présidente,
Madame la Vice-Présidente,
Chers collègues,
Au nom du groupe des associations du CESER, nous souhaiterions vous alerter sur le
devenir des emplois associatifs de l’ex-région Limousin, et, plus largement sur le budget
consacré par la Région à la vie associative, traduisant un net recul de la politique
régionale dans ce domaine.
Ainsi que vous le savez, la politique que l’ex-région Limousin avait initiée en faveur
de l’emploi au sein du monde associatif a connu sa fin en 2021. Les 341 associations de
cette ex-région, qui géraient 422 emplois aidés, vont devoir solliciter les directions
sectorielles desquelles elles relèvent à partir de cette année, ou trouver d’autres
ressources pour la conduite de leur projet.
Il est de notre responsabilité de pointer plusieurs éléments :
– Seules 188 associations (soit 55 %) seraient susceptibles d’être basculées vers les
règlements sectoriels, sous réserve que leur projet soit éligible dans ce cadre, et que
le total des aides sollicitées auprès de la Région ne dépasse pas le taux de 30 %
prévu par ces mêmes règlements.
– Les 135 associations restantes devront trouver d’autres financements, bien
aléatoires, et risquent de devoir licencier les 155 personnes précédemment
employées.
– Le budget régional consacré à la vie associative connaît ainsi une diminution
drastique (de plus de 40 % en fonctionnement), ne manquant pas de nous laisser un
goût amer d’abandon de toute ambition dans ce domaine.
– Dans les budgets spécifiques vers lesquels devraient être redirigées les 188
associations des domaines concernés (sport, culture, jeunesse…), n’apparaissent
aucunement les augmentations correspondant au financement des 267 emplois
basculés.
Tous ces éléments ne manquent pas de nous interroger.
Combien de personnes anciennement salariées au sein de ces associations vont rester
sur le carreau ? Probablement approchera-t-on les 200 emplois sacrifiés au final !
Qu’aurait-on dit si une entreprise de 200 salariés mettait la clé sous la porte ? On aurait
parlé de drame humain, de grande perte pour le territoire, de risque de désertification…
Et ce sera probablement bien en-dessous de la réalité pour le Limousin ! Car 200 emplois
associatifs, cela représentait aussi toute une capacité de dynamisation d’équipes de
bénévoles, de projets collectifs, de vivre ensemble, de sens de la vie.
Nous savons bien sûr qu’il n’était pas possible de pérenniser en tant que tel un
dispositif qu’il aurait fallu étendre à l’ensemble de la région.2
Mais l’évaluation (sur les dispositifs de soutien à la vie associative) qui avait été
commanditée par les services de la Région, et dont nous attendons toujours la
publication, proposait des pistes d’expérimentation qui auraient mérité au moins d’être
mises en débat.
Plus particulièrement, il était proposé de flécher prioritairement ces dispositifs de
soutien vers les territoires les plus fragiles, ce qui aurait permis de les étendre à la
Nouvelle-Aquitaine. Dans les villages les plus éloignés, les zones à faible population,
les quartiers dits défavorisés, les bourgs en voie de dépeuplement, que serait la vie sans
les associations ? C’est bien dans ces territoires qu’un tel dispositif pourrait retrouver
véritablement tout son sens.
Au final, les représentants des associations du CESER sont très inquiets du signal
envoyé par la baisse du budget régional dans le domaine de la vie associative.
D’autant plus que la crise actuelle a révélé combien la vie associative était nécessaire
à la survie même de notre société, au même titre que tous les secteurs qui nous ont aidé
à traverser l’épreuve. Faut-il le répéter ? Le monde associatif assume aujourd’hui de
nombreuses missions de service public, et en pallie les nombreuses lacunes ; il participe
à la cohésion et à la résilience de notre société, et il est aussi un acteur très important de
l’économie des territoires.
Plus largement, il nous semble dans cette période marquée par une grave crise sanitaire
que le temps est venu, pour la Région, de prendre la mesure de ce que représente la vie
associative aujourd’hui. Faut-il rappeler qu’elle s’appuie sur le bénévolat de plus d’un
million d’habitants de notre région ? Que, sur le plan économique, elle « pèse » 10
milliards d’euros et 10 % des emplois ? Qu’elle concerne des centaines de milliers de
bénéficiaires et d’adhérents ? Qu’elle résonne avec les ambitions de la feuille de route
NeoTerra au travers de toutes ses composantes : engagement citoyen, patrimoine
culturel et naturel, tourisme social, éducation et formation, sport et culture, loisirs, … ?
Et surtout que sa plus-value n’est pas seulement économique, mais qu’à travers toutes
ses dimensions sociales et sociétales, elle nous permet de faire humanité ensemble. »
Voici l’intervention complète de Philippe SAÏD :
« QUIZ : en 9 lettres commençant par un b :
Soupçonnés d’amateurisme, ceux-ci peinent à faire valoir leurs compétences.
Confrontés à une opinion publique qui tient l’altruisme pour douteux et la gratuité pour
suspecte, ils sont parfois contraints de justifier leurs motivations, alors même que
l’existence du monde associatif repose sur leur engagement.
Et oui, ce sont les bénévoles que l’on retrouve dans de multiples secteurs : la
solidarité, le social, l’éducation, la culture, l’environnement, le sport et bien d’autres
domaines …
Pourquoi, aujourd’hui vous parler des bénévoles alors que l’on étudie le budget du
Conseil régional de Nouvelle Aquitaine et qu’ils ne coûtent rien ?
Parce qu’ils rapportent beaucoup et que nous devrions intégrer leur apport en recettes
dans de nombreux budgets institutionnels ! Car les associations constituent l’un des
piliers de notre vie démocratique, sociale et culturelle. Dans les territoires, elles sont le
creuset de la démocratie et de la participation citoyenne et jouent un rôle d’alerte et
d’innovation sociale indispensable.
A titre d’exemple, rien que dans le sport :
290 000 bénévoles représentant 11 000 emplois temps plein : faites le calcul auquel
s’ajoutent les 7300 salariés répartis sur les 18 000 associations sur toute notre région
souvent en emplois mutualisés dans nos zones rurales.
7300 emplois qui consomment et font vivre comme tous salariés de nos entreprises
leurs familles et leurs territoires.
Rassurez-vous ! Je ne vais pas vous faire sortir les mouchoirs mais simplement vous
faire pointer du doigt nos contradictions.
Pour rappel : notre rapport envoyé au Conseil Régional en avril 2020 :
L’urgence c’est aussi de réfléchir sans attendre à la sortie de crise, et à l’impérieuse
nécessité de mutations aux plans économique, social, écologique mais aussi
démocratique etc. …et pour conclure :
Dans ce contexte, le CESER renouvelle sa demande au Conseil Régional d’engager
une dynamique d’anticipation, dans le même esprit que celle portée avec « Néo Terra
» que nous vous avons appelé avec beaucoup de fierté Néosociétas.
Le Conseil Régional indiquant dans son rapport de BP 2022 vouloir s’investir
totalement dans cette réflexion collective, j’en suis le premier ravi. Malheureusement
je n’ai pas réellement le sentiment de retrouver dans ce futur budget, au demeurant
rassurant de bon père de famille, cette attente collective que nous avions pointée pour
le monde d’après.4
Loin de moi l’idée de vouloir mettre en opposition les bénévoles et les salariés de
l’économie sociale et solidaire à ceux des entreprises, je voudrais seulement que nous
les regardions de la même manière.
Ainsi, madame la Présidente et mes chers collègues, je sollicite le CESER afin que
nous ayons le courage d’assumer notre opinion, sans pour autant marquer une
quelconque opposition, en rappelant dans notre avis : l’urgence impérieuse de cette
mutation sociale que nous avions pointée en avril 2020 .
Pour cela, je vous propose, en tenant compte de la diversité culturelle, économique et
sociale de nos bassins de vies, que le CESER sollicite le Conseil Régional afin de lui
demander de soutenir une véritable politique d’accompagnement à l’emploi associatif
porteur de sens et vecteur de lien social. »
Voici l’intervention complète d’Isabelle LOULMET :
« Au nom de groupe des associations, nous souhaitons partager avec l’ensemble des
membres du CESER NA notre préoccupation sur l’application aux associations et
fondations, depuis le 1er janvier 2022, de la loi du 24 août 2021 confortant le respect
des principes de la République.
C’est pour nous une alerte qui concerne nos libertés démocratiques, alors que les
associations, par leurs objets, leur implication dans les territoires, leur création de liens
entre les personnes, participent pleinement à l’animation de la vie sociale et
démocratique partout en France et en Nouvelle-Aquitaine.
De quoi s’agit-il ?
Depuis le 1er janvier 2022, toute association ou fondation qui sollicite une subvention
publique, demande un agrément d’Etat ou accueille un jeune en service civique, doit
signer un contrat d’engagement républicain. Cette signature impose un certain
nombre d’engagements : respecter les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de
dignité de la personne humaine ainsi que les symboles de la République, ne pas
remettre en cause le caractère laïque de la République et s’abstenir de toute action
portant atteinte à l’ordre public.
En cas de manquement, l’association va se voir retirer la subvention ou l’agrément.
La part d’interprétation laissée à l’administration dans l’application de ce décret nous
inquiète. D’autant que les dirigeants et dirigeantes associatifs sont rendus responsables
de la bonne application du contrat d’engagement républicain par leurs membres,
salariés et bénévoles.
La liberté d’action associative est un principe fondamental de notre République, y
compris dans sa dimension d’alerte, d’interpellation et de contestation. La liberté
d’expression aussi.
Alors que nous mesurons en période de crise combien une vie associative riche et
multiple est un atout pour notre région, combien nous avons besoin de l’expression
diverse et débattue de l’ensemble des acteurs associatifs impliqués dans des projets
librement choisis qui fondent la vitalité de nos territoires, nous alertons sur l’esprit de
défiance qui anime ce décret à l’égard des associations.
La vie démocratique d’un pays, d’une région, ne se réduit pas à des élections à dates
fixes, mais s’éprouve chaque jour au travers des projets portés par des hommes et des
femmes investis dans des associations locales, départementales, régionales, nationales,
qui insufflent force et dynamisme à notre vie commune.
Les associations, leur libre expression, leur créativité, les liens humains qu’elles
créent et entretiennent, sont un bien précieux pour notre collectivité qu’il nous
appartient à toutes et tous de protéger.
Merci. »